Irulaane ou la face artistique de Lauriane Renaud...

Irulaane ou la face artistique de Lauriane Renaud...
Toujours un peu perchée...

vendredi 1 juillet 2011

Quelques livres avant l'été...

Das un précédent post, j'annonçais une critique de Somoza qui... ne vint pas. En parler donc, parce que c'est l'été, le temps des bons gros romans captivants et pas nécessairement insipides...

José Carlos Somoza ? Un mec né à la Havane en 1959 et dont la formation initiale fut la psychiatrie. Pas anodin de s'en rappeler car l'écrivain génial qu'il est devenu trempe sa plume déliée et atypique au coeur même de l'âme humaine dont il connaît bien les ressorts. Et un ressort qu'il maîtrise particulièrement est celui de l'angoisse, des terreurs collectives et individuelles. 

Pas simple de transmettre la peur dans un roman, car quoi qu'on en dise, le lecteur reste bien en sécurité derrière sa page blanche striée de petites lignes symétriques. Par exemple, il peut quand il le veut relever la tête et agiter la main avec un beau sourire à son marmot qui pitrouille dans l'eau bleue sous un ciel d'Azur, se laisser distraire par le bruit des vagues, le cri des mouettes où l'appel de l'apéro... A ce niveau, il faut avouer que le cinéma est plus efficace car il parle à d'autres sens et impose une présence plus forte dans le quotidien qu'il peut parvenir à effacer, au moins à supplanter quelques instants.

Alors il y a les auteurs, comme Christophe Grangé ou Dan Brown à ses heures, qui s'efforcent de pallier  cette maigreur sensorielle de l'écrit à grands renforts d'horreur, de tripes répandues et de comportements bestiaux et qui ne deviennent réellement efficaces qu'une fois adaptés à l'écran.

Mais Somoza, lui, n'a visiblement pas besoin de ces artifices. Il sait où frapper pour que l'angoisse monte et pour qu'elle ne soit pas facilement chassée par les rayons de soleil environnants. On se demande d'ailleurs pourquoi ses romans finissent par dériver vers l'horreur et le "gore" à la fin, tant ils n'en auraient pas besoin.

LA DAME N°13, conseillé par Cécilia... (et c'est déjà un label!)


L'envers de la beauté, la poésie comme arme ou une autre façon de gloser sur "Au commencement était la Parole et la parole était Dieu".


Elles sont 13, depuis toujours, depuis l'origine du monde sans doute puisque c'est le pouvoir de la parole qui fait exister mais c'est aussi lui qui détruit. 13 muses donc, immortelles, puissantes, incarnées dans des figures inspiratrices et romantiques pour mieux masquer leur véritable nature : le pouvoir à l'état pur, le pouvoir sans limites, sans conscience, sans moralité.


Un roman sur la poésie et sur le rêve... ou plutôt le cauchemar. Car voilà ce qui fait la véritable force de Somoza : parvenir à transmettre ses terreurs nocturnes, toucher du doigt les nôtres avec cette part d'irrationnel qui échappe à toute analyse et du coup ne peut être totalement raisonnée. 


L'histoire commence par un rêve atroce, obsédant, récurrent qui rend le narrateur insomniaque et déjà border-line. Jusqu'au jour où la réalité et le rêve se confondent : à la télévision, il voit la maison de ses rêves dans laquelle s'est réellement déroulé un crime sordide quelques mois auparavant. Lorsqu'il se rend sur les lieux (bien évidemment!), tout semble l'y attendre, jusqu'à Raquel, une femme aussi belle qu'étrange, guidée par des rêves similaires. 

Et les voilà tous deux embarqués à la poursuite de ces muses millénaires, toutes plus diaboliques et manipulatrices les unes et que les autres. 


Quelques scènes de frisson absolu parce qu'elles marchent sur nos peurs intimes, comme celle de la petite fille (l'une des muses) au physique enfantin et au regard millénaire et glacial dont on entend la voix fluette retentir dans le noir vers le narrateur "Viens jouer avec moi"....


Vous l'aurez compris, on n'ouvre plus jamais un livre de poésie de la même manière après ÇA !


LA THÉORIE DES CORDES:


Cette fois-ci, Somoza délaisse le fantastique pour la SF, s'attelant à une théorie physique séduisante (et qui a l'avantage d'être intelligemment vulgarisée dans cette oeuvre) : la théorie des cordes qui suppose une infinités de dimensions supplémentaires aux 4 classiquement étiquetées et qui, dans ce polar scientifique, pourrait nous amener à voir dans le passé... 
Pour peu que l'on sache ouvrir correctement ces cordes. 
Pour peu que l'on résiste à L'IMPACT : un désordre psychologique qui naîtrait de la contemplation du passé de l'humanité... les événements encodés dans notre mémoire collective, soudainement vus en direct.
Et pour peu qu'on ne ramène rien du passé... 


C'est ce que va découvrir peu à peu la superbe Elisa Robledo, jeune et brillante physicienne, qui a participé à l'expérience 10 ans auparavant et qui en est ressortie transformée à tout jamais. Car les scientifiques embarqués dans l'aventure sont éliminés les uns après les autres dans des circonstances des plus horrifiques...


Science sans conscience, abîmes de l'âme humaine, fantasmes et désirs refoulés, puissance du cauchemar et de la psyché... du grand Somoza.


CONCLUSION:


J'avais envie de vous parler, une fois n'est pas coutume, d'une tétralogie de littérature pour la jeunesse, bien fraîche, bien sympathique, qui fait rêver et même un peu plus... Mais, non, derrière Somoza, vous parler de Rebelles, Rumeurs, Tricheuses et Vénéneuses d'Anna Godbersen, ce serait comme... vouloir vous refiler un babybel derrière un Comté 36 mois d'affinage...  










2 commentaires:

Cécilia a dit…

Quelle critique! Une plume à la fois élégante et drôle, c'est parfait. Et merci pour le label!

Irulaane a dit…

On va penser à un logo avec ton prénom... hi hi ! Mais la découverte de Somoza, je te la dois... Alors respect !